top of page
Rechercher

Les atmosphères explosives, un sujet parfois mal connu

Dernière mise à jour : il y a 4 jours



Qu’est-ce qu’une atmosphère explosive ?


Une atmosphère explosive, ou ATEX, désigne un mélange de substances inflammables (gaz, vapeurs, brouillards ou poussières) avec l’air, dans des conditions atmosphériques normales, qui peut s’enflammer en présence d’une source d’ignition.

Un simple interrupteur électrique, une étincelle ou une surface chaude peuvent suffire à déclencher une explosion si ces substances sont présentes en quantités critiques.


Un danger réel… et fréquent


Les ATEX peuvent survenir dans de nombreux environnements industriels et de construction. Voici quelques exemples concrets :

  • Silo à grains : En 2020, une explosion a soufflé un silo agricole en Allemagne, provoquée par l’accumulation de poussière de céréales inflammables.

  • Station-service : Une intervention de maintenance mal préparée a causé une explosion à la suite d’un dégazage insuffisant.

  • Atelier de peinture automobile : Un éclairage non certifié ATEX a généré une étincelle, provoquant l’embrasement de vapeurs de solvants.

  • Chantier naval : Des travaux de soudage réalisés dans une cuve mal dégazée ont entraîné une explosion de vapeurs d’hydrocarbures.


Logo certifiant ATEX dans l'union Européenne qui doit se trouver sur les appareils ATEX
Logo certifiant ATEX dans l'union Européenne qui doit se trouver sur les appareils ATEX

Le cadre réglementaire européen : les directives ATEX


Plusieurs directives encadrent les ATEX dans l’UE :

  1. Les directives sociales à destination des employeurs

    - Directive 89/391/CEE  Mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs (notamment les neufs principes généraux de prévention).

    - Directive 1999/92/CE  Applicable depuis juillet 2006 « protection en matière de santé et de sécurité des travailleurs susceptibles d’être exposés au risque d’atmosphère explosive »

    -Classement, Zonage ATEX et signalisation

    - rédaction du DRPCE


    Suite à cette directive deux arrêtés sont parus, datés 8 juillet 2003

    Ces arrêtés concernent en particulier:

    -La définition des emplacements où des ATEX peuvent se former.

    -Les prescriptions minimales visant à améliorer la SS des travailleurs exposés risques d’explosions.

    -Les critères de sélection des appareils et des systèmes de protection utilisés dans les emplacements où les ATEX peuvent se présenter.

    -Le panneau de signalisation des emplacements dangereux.


    Un arrêté du 28 juillet 2003 fixe les conditions d’installation des matériels électriques dans les emplacements où des ATEX peuvent se former.


  2. Les directives techniques à destination des fabricants et des distributeurs de matériel ATEX

    - Directive 94/9/CE ATEX 95  Rapprochement des législations des Etats membres pour les appareils et systèmes de protection destinés à être utilisés en ATEX

    - Directive 2014/34/UE Déclaration de conformité et certification de type UE au lieu de CE


Classification des zones ATEX

Voici un rappel des zones, avec des exemples réels :

Milieu

Zone

Risque

Exemple

Gaz

Zone 0

Présence continue

L’intérieur d’un réservoir de carburant


Zone 1

Présence probable

Zone autour des soupapes de décompression


Zone 2

Présence accidentelle

Parking souterrain mal ventilé

Poussières

Zone 20

Présence permanente

Intérieur d’un silo à farine


Zone 21

Présence probable

Système de transport pneumatique de sciure


Zone 22

Présence occasionnelle

Local technique d’atelier de ponçage


Les bases scientifiques : l'hexagone de l'ATEX


L'hexagone de l'explosion
L'hexagone de l'explosion

L'explosion n’est possible que si 6 éléments sont réunis en même temps:

  1. Un combustible : bois , papier, aluminium, produit chimique inflammable, essence, etc

  2. Le combustible doit etre en suspension dans l'air. Ex. : gaz inflammable, poussière de bois, ouate, farine, méthane, vapeur de produit chimique inflammable ou d'essence au dessus de la température de point éclair)

  3. Un comburant (généralement l’oxygène)

  4. Une source d’inflammation (ex. : outil non ATEX, arc électrique, étincelle, flamme, etc)

  5. Un milieu confiné garantissant une mauvaise évacuation du combustible en suspension (ex : galerie souterraine, citerne, tranchée profonde, local sans aération, etc

  6. Le domaine d'explosivité : Un mélange air-combustible n’est explosif que s’il se trouve entre deux seuils :

    • Limite inférieure d’explosivité (LIE) : concentration minimale en combustible en dessous de laquelle le mélange est trop pauvre pour exploser.

    • Limite supérieure d’explosivité (LSE) : concentration maximale au-delà de laquelle le mélange est trop riche pour exploser (manque d’oxygène).

    Entre la LIE et la LSE, le mélange est explosible : c’est ce qu’on appelle le domaine d’explosivité. Les poussières n’ont pas de LIE/LSE exprimées en %, mais un seuil minimal de concentration en g/m³.

    Exemple : Sur un chantier de rénovation, un aspirateur industriel non certifié a provoqué une décharge dans un nuage de poussières de plâtre, déclenchant une explosion


Focus sur le secteur du BTP


Dans le secteur du BTP (bâtiment et travaux publics), les risques ATEX sont souvent sous-estimés, alors qu’ils peuvent être mortels. Ils concernent surtout les interventions dans des environnements clos ou contaminés, ou l’utilisation de produits inflammables. Voici les principaux risques et les moyens de prévention et de protection associés :


Vapeurs de solvants ou de résines


  • Sources : peinture, colles, résines époxy, bitume, imperméabilisants.

  • Exemples de situation :

    • Application de résine dans une cave ou un local mal ventilé.

    • Nettoyage avec solvants dans des cuves ou citernes.


      Risque : formation d’un nuage explosif dans l’air → explosion en présence d'une lampe halogène, d’un outil électrique, ou même d’une étincelle statique.


Travaux par point chaud en atmosphère confinée


  • Sources : soudage, meulage, découpe thermique.

  • Exemples :

    • Réparation de canalisations ou de réservoirs contenant des hydrocarbures résiduels.

    • Démolition de structures ayant contenu des produits inflammables.


      Risque : inflammation de vapeurs résiduelles ou de poussières.


Poussières combustibles en suspension


  • Sources : bois, plâtre, ciment, farine, granulés.

  • Exemples :

    • Ponçage ou sciage de matériaux en intérieur.

    • Nettoyage de silos ou gaines techniques.


      Risque : poussière en suspension + source d’ignition = explosion.


Présence de gaz ou de vapeurs dans le sol ou réseaux enterrés


  • Sources : anciennes canalisations de gaz, nappes phréatiques polluées, fuites industrielles.

  • Exemples :

    • Terrassement en zone industrielle.

  • Creusement de tranchées à proximité de réseaux de gaz.


    Risque : explosion par mise à feu accidentelle (outil électrique, flamme, câble endommagé).


    Moyens de prévention et de protection utilisés dans le BTP


  • Évaluation ATEX dans le plan de prévention / PPSPS

    • Identification des zones à risque.

    • Planification des interventions à risque.

  • Ventilation efficace

    • Ventilation naturelle ou assistée (soufflante).

    • Maintenir les concentrations de vapeurs < LIE (limite inférieure d’explosivité).

  • Surveillance de l’atmosphère

    • Détecteurs de gaz portables ou fixes.

    • Détection continue dans les zones confinées.

  • Utilisation de matériel certifié ATEX

    • Aspirateurs, éclairages, outils électroportatifs.

    • Équipements marqués ATEX zone 1, 2, 21, 22 selon le cas.

  • Dégazage et nettoyage préalable

    • Obligation de neutraliser toute atmosphère inflammable avant travaux (ex : rinçage, purge, inertage à l’azote).


    Cas réel : En 2018, dans une usine désaffectée transformée en logements, des ouvriers ont été gravement brûlés suite à l’inflammation de vapeurs d’hydrocarbures résiduels.


Mesures de prévention et protection du risque ATEX


Empêcher la formation d’une atmosphère explosive

Pour cela, il faut agir sur les produits et les procédés qui peuvent être à l’origine de la formation d’une ATEX.


Agir sur les combustibles

  • remplacer le produit combustible par un autre incombustible ou moins combustible,
  • augmenter la granulométrie (passer de la poudre aux granulés),

  • ajouter des solides inertes à des poussières combustibles,

  • maîtriser les paramètres du procédé (température, pression…) en fonction des caractéristiques physico-chimiques des produits,

  • maintenir la concentration du combustible hors de son domaine d’explosivité (captage à la source des vapeurs ou des poussières, dilution, nettoyage régulier par aspiration des couches de poussières déposées...).


Agir sur le comburant

La principale mesure consiste à introduire un gaz inerte (azote, argon…) en proportions suffisantes dans une atmosphère chargée de substances combustibles entrainant l’appauvrissement de celle-ci en oxygène et rendant donc l’inflammation impossible. Attention toutefois au risque d’hypoxie (diminution de l’apport d’oxygène dans les tissus de l’organisme) en cas de présence d’un salarié dans la zone concernée.


Éviter les sources d’inflammation


Cette action de prévention s’attache en premier lieu à mettre hors de la zone ATEX le matériel qui n’a pas nécessité de s’y trouver. Il faut ensuite éliminer l’ensemble des sources d’inflammation potentielles notamment les flammes et feux nus, les surfaces chaudes, les étincelles d’origines mécanique, électrique ou électrostatique, les échauffements dus aux frottements mécaniques, aux appareils électriques ou aux moteurs thermiques Pour ce faire, différentes mesures peuvent être mises en œuvre.


Agir sur les procédés

Il s’agit notamment de la mise en place de :

  • mises en sécurité suite au dépassement des seuils définis pour certains paramètres de sécurité (température, pression, taux d’oxygène…),

  • systèmes de refroidissement afin de contrôler, par exemple, une réaction chimique ou un échauffement dû à la compression des gaz,

  • séparateurs magnétiques, gravitaires (boîtes à cales) afin de supprimer les éléments pouvant provoquer des étincelles ou véhiculer des surfaces chaudes dans les réseaux de ventilation.


Réaliser des contrôles

Il s’agit notamment de vérifier que certains paramètres ne dépassent les seuils au-delà desquels l’inflammation est effective. Pour cela, différents systèmes de détection existent :

  • détecteurs d’élévation de température, de pression…

  • thermographie infrarouge (détection des points chauds sur les réseaux électriques),

  • détecteurs de monoxyde de carbone (détection d’un début de fermentation avec dégagement de chaleur),

  • systèmes de contrôles de la vitesse de défilement et/ou de déport des bandes transporteuses, de bourrage, de rotation (limitation des frottements, des échauffements et des charges électrostatiques générées lors du fonctionnement de ces équipements).


Agir sur les appareils

  • adéquation des appareils à la zone ATEX,

  • outillage mobile ne provoquant pas d’étincelle,

  • équipotentialité et mise à la terre de l’ensemble de l’installation,

  • installation électrique correctement dimensionnée et régulièrement contrôlée.


Mettre en place des mesures organisationnelles

  • mode opératoire d’exécution des tâches,

  • permis de feu pour l’ensemble des travaux par points chauds,

  • autorisation de travail ou bon d’intervention pour toute opération en zone ATEX,

  • limitation du nombre de travailleurs entrant dans une zone ATEX,

  • concertation avec les entreprises extérieures et gestion de la coactivité (plan de prévention, présence d’un référent pour les entreprises extérieures),

  • mise en place de « zones fumeurs » pour faire respecter l’interdiction de fumer aux endroits où des ATEX peuvent survenir,

  • port de vêtements de travail appropriés faits de matériaux facilitant l’écoulement des charges électrostatiques, nettoyage régulier par aspiration pour les poussières,

  • formation des salariés.


Toutes les mesures prises doivent l’être de manière réaliste et rigoureuse, afin d’apporter des solutions de prévention efficaces et adaptées.



Limiter les effets d’une explosion


La maîtrise des sources d’inflammation étant difficile à mettre totalement en œuvre, dans le cas où la formation de l’atmosphère explosive n’a pu être évitée, il convient d’adopter des mesures de protection permettant d’atténuer les effets néfastes d’une explosion. Les actions à entreprendre sont spécifiques à chaque situation de travail, procédé ou installation :


  • actions sur le confinement (évents d’explosion),

  • extincteurs déclenchés (suppresseurs d’explosion),

  • appareils résistant à la surpression d’explosion,

  • systèmes de découplage technique (système qui empêche une explosion de se propager au reste de l’installation : arrête-flammes, écluses rotatives, vannes à fermeture rapide, vannes « Ventex », extincteurs déclenchés, déviateur d’explosion, cheminée de dégagement…),

  • actions sur la configuration et la conception des locaux : compartimentage, résistance des matériaux (verre, toiture en matériaux fragiles...), conception et construction des locaux (choix de matériaux adaptés et résistants au feu, locaux résistant à l’effondrement éventuel de l’édifice), regroupement du personnel à des emplacements dédiés afin qu’il ne soit pas victime de la chute d’éléments de structure.


De tels moyens techniques (évents, systèmes de découplage technique…) sont des systèmes de protection contre l’explosion au titre de la réglementation ATEX et doivent donc être reconnus et certifiés conformes à celle-ci.


Event d'explosion
Event d'explosion

La culture du risque : clé de la sécurité


  • Engagement fort de la Direction sur ce sujet

  • Formation obligatoire adaptée pour tous les intervenants en zones ATEX.

  • Plans de prévention et permis de travail en zone ATEX rédigés avec les entreprises extérieures.

  • Signalisation claire des locaux et machines et respect des procédures.

  • Exercices réguliers de mise en sécurité.


    Exemple : Dans une entreprise de traitement de déchets, la sensibilisation des opérateurs à la manipulation de solvants a permis d’éviter plusieurs incidents majeurs.


Les atmosphères explosives sont invisibles mais dangereuses. Grâce aux directives européennes, aux équipements certifiés et à la formation adéquate du personnel, il est possible de maîtriser ce risque. Dans le BTP comme ailleurs, la prévention passe par l’analyse, la rigueur et l’anticipation.








 
 
 

Comments


bottom of page